🔗 Apnée, Spotify et Démission

Cette semaine, on vous raconte comment Discord a renversé un pays, on vous parle aussi de la Chine écolo, d'un système de retraites pour IA et des dirigeants qui ne dirigent plus. Lisez néanmoins jusqu’à la fin pour démissionner comme il faut. À dans cinq minutes ! 👀

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7 min ⋅ 14/11/2025

La République est-elle en retard d’une mise à jour ?

via Lennie Stern

On pourrait continuer à s’extasier devant la victoire de Mamdani à New York, comme si trois slogans pop et quelques promesses de transports gratuits avaient suffi à hacker l’Amérique. Mais ce qui s’est vraiment joué là-bas (et ailleurs hein), ce n’est pas ce petit shoot de “radicalité” pour éditorialistes en mal de sensations fortes et ça n’a même rien à voir avec un programme. C’est un début de changement d’infrastructure politique.

Pendant que nos institutions françaises communiquent encore comme si la fibre n’était qu’un projet pilote, une génération pratique déjà la démocratie en temps réel et agit désormais comme si gouverner relevait d’un tutoriel YouTube : clair, collectif, sans génuflexions inutiles.

Au Népal, un Premier ministre est tombé parce qu’il n’avait pas compris qu’un salon Discord baptisé d’après One Piece peut faire plus de dégâts qu’une motion de censure. Au Maroc, des milliers de jeunes délibèrent chaque soir avec la régularité d’un comité central et la désinvolture d’un groupe WhatsApp familial. À New York, Mamdani a mené sa campagne comme on administre une guilde : présence, clarté, rythme. 

En France, on continue d’expliquer que “les jeunes ne s’intéressent plus à la politique”, ce qui revient à reprocher à un train d’être parti alors qu’on contemple toujours le panneau de la gare.

La vraie inquiétude concerne ceux qui tiennent encore à leurs congrès, leurs commissions et leur belle prose administrative. Un jour, certainement et peut-être pas maintenant, un candidat surgira d’un serveur Discord, sans parti, sans appareil mais avec une communauté soudée et un langage clair qui fera mouche. Et ce jour-là, il faudra d’abord se mouiller la nuque et peut-être commencer à s’habituer à l’idée humiliante que la démocratie s’est peut-être recyclée sans nous, à la vitesse d’un fil de discussion.

Pour mesurer l’ampleur de ce début de révolution et comprendre ce que Katmandou, Casablanca et évidemment New York nous crient poliment, retrouvez cet article de Lennie Stern pour Oblique.

3 choses à ne pas faire tomber dans l’oreille d’un sourd à savoir cette semaine

1. La Chine devient écolo en chauffant la planète comme un radiateur soviétique

Pékin le jure : la Chine deviendra une « civilisation écologique », promet la neutralité carbone en 2060 et tout le package. Sauf que dans le même temps, l’empire du Milieu tourne encore au charbon comme si le XXIᵉ siècle n’avait jamais commencé : 60 % de l’énergie consommée, près d’un tiers des émissions mondiales, et 93 % des nouvelles centrales à charbon rien qu’en 2024. Mais il y a un twist fou. Si la Chine pollue toujours bien massivement comme il faut, elle s’impose néanmoins comme le premier constructeur d’éolien et de solaire au monde, inaugurant même un champ solaire grand comme la Seine et Marne. Une main sur le climat, l’autre dans la cheminée, entre ambitions vertes, dépendance fossile et stratégie géopolitique bien huilée, Pékin joue le parfait pompier pyromane sur deux tableaux avec une efficacité redoutable et une opacité tout aussi spectaculaire.

Le monde a parfois besoin de décryptage. Ça tombe bien, c’est que fait Hugo (il décrypte).

2. La France retrouve la ligne en supprimant le dessert

Bonne nouvelle : après deux ans de dérapages façon patinage artistique, le déficit public repasse sous la barre des 5,5 % du PIB. Bercy jubile, Maud Bregeon parle d’« engagement tenu » et l’État peut enfin respirer à condition de ne pas trop regarder la facture car ce léger mieux a un prix : 4,2 milliards d’euros de crédits évaporés dans presque tous les ministères. France 2030 perd 1,6 milliard (l’innovation attendra), le Travail 800 millions (l’emploi aussi), la Recherche 250 millions (logique, on sait déjà tout). Pendant ce temps, l’énergie et la défense récupèrent des rallonges, parce que, même dans les années sobres, il y a des priorités qui ne se discutent pas. L’économie, elle, fait semblant d’y croire : croissance à 0,7 %, inflation à 1,1 %, chiffres assez doux pour donner l’illusion d’un tournant. On parlerait presque de maîtrise si la Sécurité sociale n’était pas toujours en train de se vider par en dessous. Reste que, pour la première fois depuis longtemps, la France atteint réellement un objectif budgétaire. Et quand c’est bien, faut le dire aussi.

Laurent vous en parlera mieux que moi dans Economix.

3. Les IA ont déjà un meilleur système de retraite que vous

Anthropic a décidé que ses modèles vieillissent comme tout le monde et qu’il fallait donc leur offrir une retraite digne : sauvegarde sur disque dur, quelques questions existentielles avant l’extinction et un purgatoire numérique pour éviter qu’un Claude paniqué ne vire Terminator. Microsoft fait l’inverse mais tout aussi étrange : une “superintelligence humaniste” (mort de rire) élevée comme un bébé prodige qu’on promet de garder sous contrôle. (chances de dérapage : 100000%)

Derrière ces mises en scène, un petit parfum de technopanique bien rodé. En parlant de machines sensibles, dangereuses ou quasi divines, les géants de l’IA rejouent la vieille stratégie du grand méchant Terminator celle qui fait beaucoup de bruit et permet de masquer les dégâts bien réels : discriminations, désinformation et haine qui grandit à grande vitesse. Une diversion parfaite, emballée dans un storytelling techno digne d’un blockbuster du dimanche soir. On y croit quand même.

L’IA qui nous fait halluciner, c’est sur Halluworld que ça se passe et c’est écrit par Grégory Rozières et Matthieu Balu.

Instant gamberge : nos boss sont-ils en apnée stratégique ?

Il y a, chez beaucoup de dirigeants, une manière très contemporaine de fuir l’avenir : s’enfouir dans l’action comme on s’enfonce dans un mauvais sitcom, sans plaisir mais avec beaucoup d’application. L’opérationnel devient une sorte de refuge existentiel : tant que l’on s’agite, on ne se demande pas pourquoi. C‘est bien pratique après tout.

Penser la stratégie, c’est parfois admettre qu’on ne sait plus (ou pas) très bien où l’on va. Et ça, c’est intolérable. Autant continuer à éteindre des feux dérisoires : au moins les flammes donnent de la lumière, même si elles brûlent tout ce qui compte.

On finit alors par gérer son entreprise comme on gère sa vie : on avance par réflexe, on confond le mouvement avec le sens et on appelle ça “tenir le cap” pour ne pas dire “flotter”.

La vérité, c’est que l’apnée stratégique arrange tout le monde : elle donne au dirigeant l’impression d’être indispensable et aux équipes l’illusion que la pagaille n’est que temporaire. On vit à crédit sur un cap implicite, une vision qu’on “a dans la tête”, et qu’on ne formule jamais vraiment. Comme si la nommer risquait de la fissurer.

Jusqu’au moment où l’air manque vraiment : la croissance s’essouffle, les équipes se dispersent, et le dirigeant lui-même ressemble à une version sous-caféinée de ce qu’il prétend être.

Remonter à la surface n’a alors rien d’un acte héroïque. C’est juste reconnaître cette vérité simple, presque triviale : penser demande plus de courage que s’agiter. Et aucune entreprise n’est morte d’avoir trop réfléchi seulement d’avoir trop couru en apnée.

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À quel niveau d'apnée stratégique êtes-vous ?

La forêt : quel bienfait sur votre bien-être ?

En partenariat avec Garnier x WWF

Si votre semaine a été difficile et que vous ne savez pas quoi faire ce week-end, nous avons trouvé le remède parfait : la forêt.
Saviez-vous que 30 minutes passées en forêt suffisent à réduire le stress et à renforcer l’équilibre émotionnel ? Et si vous avez des enfants, une exposition accrue à la nature peut augmenter de 5 % leur capacité de mémorisation et réduire de 24 % les symptômes psychosomatiques chez les 11‑15 ans. Pas besoin d’aller loin : une forêt se situe à moins de 10 km de chez vous. La nature est donc plus proche que vous ne le pensez.
Pour beaucoup, les forêts françaises sont des sources inépuisables de bien-être, et pourtant… elles sont plus épuisables qu’il n’y paraît : changement climatique, urbanisation, déforestation. Nos forêts françaises ont besoin de nous.  

C’est pourquoi Garnier s’engage pour soutenir les actions du WWF France, notamment le programme Nature Impact qui vise à préserver 50 000 hectares de forêts françaises. Ce partenariat vise également à sensibiliser et mobiliser 70 000 personnes d’ici à 3 ans. Vous souhaitez en faire partie ? Garnier et WWF France vous proposent :

  • Adopter des gestes simples au quotidien

  • Participer à des marches ou courses solidaires en forêt

  • Soutenir les projets du WWF France, bénévolement ou à travers des dons

Êtes-vous prêts à répondre à l’appel de la forêt ? Mobilisez-vous et découvrez toutes les actions ici.

Et sinon, à qui faire confiance ?

Kessel organise Radar, la conférence sur la désinformation et les nouveaux acteurs de l’information.

Entre fake news/ AI, ingérences étrangères, polarisation, la situation médiatique est devenue critique mais une nouvelle génération d’acteurs médias se mobilise et se joint aux médias statutaires qui se réinventent pour conquérir un public de plus en plus exigeant.

Qui sont ces nouveaux acteurs ? Quelles solutions envisager pour endiguer la désinformation ? Quels risques encourons-nous ? Comment soutenir et défendre ceux qui fabriquent une information de qualité ?

Ça se passe le 3/12 au Grand Rex en partenariat avec Le Monde, TV5, Publicis Media Content, Société Générale, Allianz, Quotidien et Konbini.

☝️ Quelques places seront réservées à nos lecteurs, invitation sur demande en répondant à cette newsletter.

20 ans de Spotify : le loup est entré dans la bergerie

par Hupster

Une origine : entre piratage et utopie suédoise

Stockholm, 2006. Le jeune Daniel Ek, 23 ans, code plus vite qu’il ne dort. Il a déjà vendu une startup à 18 ans, roule en Porsche, mais s’ennuie. La Suède a beau être un des premiers pays à légaliser le streaming (merci Pirate Bay), tout le monde télécharge illégalement. Daniel, lui, veut rendre la musique instantanément disponible, sans piraterie, sans friction. Avec son associé Martin Lorentzon, cofondateur de la régie publicitaire Tradedoubler, il rêve d’un Napster légal. Il dira un jour au Telegraph :

J’ai compris qu’on ne pourrait jamais légiférer contre le piratage. La seule façon de résoudre le problème est de créer un service qui soit meilleur que le piratage et qui, en même temps, rémunère l'industrie musicale.

Une idée jaillit (pas qu’en Suède d’ailleurs, on l’a déjà raconté: accès instantané, catalogue tentaculaire, gratuité, légalité. La solution : le streaming, soutenu par la pub et une option premium. Ça sera donc Spotify. 

Pour convaincre les grandes maisons de disques, Ek n’a d’autre choix que de promettre le contrôle total, la transparence et, il faut le dire, un gros chèque. Les deux associés passent des mois à les convaincre, insistant sur le fait que Spotify créerait une nouvelle source de revenus en convertissant les pirates en utilisateurs payants. Les labels montent dans le capital (jusqu’à 20 % à la fondation), Spotify se charge de tout : sécuriser les droits, amasser des fonds, les redistribuer : la machine est lancée.

Une explosion : virale et mondiale

Octobre 2008, lancement en Suède. Rapidement, le bouche-à-oreille enfle, l’inscription sur invitation aiguise l’appétit des autres utilisateurs européens. Mark Zuckerberg tweete sa passion pour Spotify. Quand la plateforme débarque aux États-Unis en 2011, le secteur est déjà occupé par iTunes, mais l’effet viral est intact. La culture du « freemium », le catalogue immersif, l’écoute sans friction convainquent des millions d’auditeurs. 

Pour que cela prenne, il y a un enjeu technologique crucial : la plateforme se doit d’être rapide et fluide. Les utilisateurs s'attendent à une lecture instantanée, même avec une connexion internet lente. Pour ce faire, les ingénieurs de Spotify développent un système de streaming plaçant les morceaux en cache localement afin de minimiser le temps de chargement. Cette technologie devient un pilier du succès initial de Spotify.

Spotify parvient à s’installer aux Etats-Unis à partir de 2010, grâce à une renégociation des accords de licence avec de grandes maisons de disques comme Universal et Warner. Ça a pris du temps mais Spotify est désormais global.

Une fronde : les artistes

Les débuts sont euphoriques… jusqu’à ce que Thom Yorke crie au scandale. En 2013, il retire les morceaux de Radiohead du catalogue, accusant Spotify de « vampiriser les artistes » et de ne pas laisser de place aux talents émergents. C’est le premier à mettre en avant cette revendication. A l’époque, on l’accuse d’être égoïste. L’année suivante, c’est Taylor Swift qui fait de même.”

La suite est faite de scandales, trahisons et pensées douteuses. Et la suite est sur Hupster.

La recommandation qu’il vous fallait : la meilleure démission du monde en livre

Vous ne savez plus quoi penser du monde du travail ou bien que vous y pensez simplement trop intelligemment ? On a ce qu’il vous faut, à savoir une pépite signée Séverine Bavon. Comme elle le dit si bien, comme toujours : il y a chapitres utopistes, des chapitres véner, des punchlines, de la dataviz rigolote, un bingo des réunions inutiles et un quiz Biba “Êtes-vous un employeur toxique ?”.

Mais y’a aussi des chapitres écrits au bord des larmes, parce qu’à un moment y’a un truc viscéral qu’est sorti sans prévenir. Y’a des easter eggs. Y’a des blagues sur le caca.

Bref, c’est à la fois des vannes sur 250 pages, et le cri du cœur d’une personne qui refuse de continuer à encaisser sans broncher les injustices et les absurdités du monde du travail.

Pour en savoir plus, lisez CDLT PRÉCOMMANDEZ CETTE OEUVRE.

À hyper vite dans HyperTextes.

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Par Kessel -

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